Dix intellectuels ont signé, aujourd’hui, une tribune, parue sur les colonnes du quotidien français « Le Monde », dans laquelle ils appellent le président de la République, Abdelmadjid Tebboune, à faire « tout ce qui est en son pouvoir » pour que le journaliste Ihsane El-Kadi soit libéré. Entre autres signataires, il y a le philosophe Etienne Balibar, l’universitaire Joyce Blau, membre des réseaux de soutien au FLN pendant la guerre d’indépendance algérienne, le linguiste Noam Chomsky, l’écrivaine Annie Ernaux, prix Nobel de littérature ou le cinéaste Ken Loach.
« Ihsane El Kadi est accusé d’avoir trahi son pays, mais, vu des horizons éloignés d’où nous regardons et nous intéressons à l’Algérie, il nous semble qu’il a, au contraire, chevillé l’amour de cette terre à son travail de journaliste indépendant », ont écrit ces intellectuels, avant d’ajouter : « C’est pourquoi nous nous permettons, monsieur le Président Abdelmadjid Tebboune, d’écrire aujourd’hui pour vous demander de faire tout ce qui est en votre pouvoir afin que cesse l’acharnement sécuritaire et judiciaire que subissent Ihsane El-Kadi et tous les prisonniers d’opinion en Algérie ».
Pour les signataires de cette tribune, « quels que soient les désaccords et les antagonismes, l’Algérie est un idéal plus vaste que le cachot qu’elle est en train de devenir pour les journalistes critiques et les voix discordantes. Elle est la terre retrouvée des damnés de la terre ».
« Il est en votre pouvoir de libérer Ihsane El-Kadi ainsi que tous les journalistes emprisonnés et tous les détenus d’opinion. Usez de ce pouvoir, par fidélité au combat des Algériens pour la justice et la liberté », ont-ils encore ajouté.
Arrêté le 24 décembre 2022, Ihsane El-Kadi, directeur des médias « Radio M » et « Maghreb Emergent », poursuivi en vertu des articles 95 et 95-bis du Code pénal relatifs à la réception de fonds de l’étranger à des fins de propagande, a été condamné, le 2 avril 2023, par le tribunal de Sidi M’hamed, à cinq ans de prison, dont trois fermes. Le tribunal a également prononcé la dissolution de « Interface média », société éditrice des deux médias, dont les locaux ont été mis sous scellés au lendemain de son arrestation. Son procès en appel est programmé pour le 4 juin prochain.