Le ministre des Affaires étrangères et de la Communauté nationale à l’étranger, Ahmed Attaf, est revenu, ce mercredi 31 juillet 2024, au siège du ministère, sur la décision prise par l’Algérie de revoir à la baisse le niveau de sa représentation diplomatique en France qui a intervenue à la suite de l’alignement de la France sur le plan d’autonomie marocain relatif au Sahara occidental, une position exprimée dans la lettre adressée par le Président français, Emmanuel Macron, au roi du Maroc Mohamed VI et rendue publique mardi 30 juillet.
Selon le chef de la diplomatie algérienne, cette démarche française présente des développements jugés « dangereux ».
Il cite, comme premier développement, le fait que Paris reconnaît désormais « la prétendue souveraineté du Maroc sur le Sahara occidental ».
Deuxièmement, ajoute le ministre, « la France considère que le plan d’autonomie marocain comme seule base pour le règlement du conflit du Sahara occidental », ce qui, de ce fait, et selon cette logique, « exclut toute effort pour une solution alternative en application des résolutions onusiennes et de la légalité internationale, dont les résolutions du Conseil de sécurité adoptées également par la France ».
Troisièmement, enchaîne Attaf, « la France a adopté pleinement l’approche marocaine concernant la question du Sahara occidental et fait de cette question une priorité qu’elle s’engage à défendre aux niveaux national et international ».
« C’est comme si la proposition marocaine concernant le Sahara occidental était devenue une proposition française », a-t-il ajouté.
Le plan marocain « n’a jamais été pris au sérieux au sein de l’ONU »
Le ministre des Affaires étrangères a soulevé, lors de son intervention, quelques remarques, quant à ces nouveaux développements.
Selon lui, « la démarche française, qui prétend viser à relancer le processus politique pour le règlement du conflit du Sahara occidental, contribue au contraire à perpétuer statu quo dont souffre ce processus depuis près de deux décennies ».
« Il s’agit d’un statu quo directement provoqué par le plan d’autonomie présenté par le Maroc », a-t-il déclaré.
Pour Attaf, en proposant ce plan, les autorités marocaines avaient comme objectif, d’ « anéantir le droit à l’autodétermination du peuple sahraoui en avortant l’organisation d’un référendum », « anéantir les solutions politiques alternatives et empêcher l’émergence de toute initiative sérieuse » et « gagner plus de temps pour consolider le fait accompli colonial ».
Ainsi, a-t-il estimé, « le soutien total et absolu de la France à la proposition marocaine représente une tentative de faire renaître ce projet de ses cendres et de raviver ces objectifs poursuivis par le Maroc ».
Le chef de la diplomatie algérienne s’est demandé par la suite « comment cette proposition n’a pas été débattue ne serait-ce qu’une heure, une minute ou même une seconde depuis plus de 17 ans ? », avant de répondre : « Parce qu’il n’a pas été pris au sérieux en tant que cadre de résolution du conflit au Sahara occidental ».
Il a fait remarquer, dans le même ordre, que ce plan n’a pas retenu l’attention de « quatre envoyés de l’ONU qui ont occupés ce poste au cours des deux dernières décennies ».
L’autre remarque soulevée par Attaf est que « la décision française de soutenir la réalité coloniale imposée au peuple sahraoui va à contre-courant des récents efforts diplomatiques déployés par les Nations Unies et par d’autres acteurs internationaux dans le but de relancer le processus politique pour mettre fin au conflit ».
Par ailleurs, cette démarche, a-t-il encore ajouté, n’est rien d’autre qu’un « accord » qui, d’après lui, « n’est pas valable légalement, politiquement ou moralement », conclu entre deux parties « aux dépens d’un tiers impuissant, qui est le peuple sahraoui ».
Pour finir, le ministre a indiqué que « cette décision française, malgré ses objectifs recherchés qui servent la réalité coloniale au Sahara Occidental, ne peut pas changer les données juridiques internationales de la question du Sahara Occidental » puisque « la question sahraouie reste, aux yeux du droit international, une question de décolonisation ».
Tebboune informé par Macron de cette nouvelle position française le 13 juin en Italie
Ahmed Attaf a tenu, durant son intervention, à préciser que « le président de la République a été informé à l’avance par son homologue français lors de leur rencontre le 13 juin, il y a plus d’un mois et demi, en marge de la réunion du G7 à Bari, en Italie ».
Dans les justifications, a poursuivi Attaf, le Président français, a insisté sur le fait que « cette démarche n’est pas nouvelle et n’apporte rien de nouveau », qu’elle « vise à contribuer à la relance de la voie politique pour le règlement du conflit » et que « la France reste fidèle à ses promesses et à ses engagements de soutenir les efforts du Secrétaire général de l’ONU et de son Envoyé personnel ».
« La réponse du Président de la République était ferme, résolue et très précise », a ajouté le ministre.
Ainsi, Abdelmadjid Tebboune a estimé que « la nouvelle position française n’est pas une simple reproduction des positions déclarées précédemment, mais va bien au-delà, car elle se concentre sur l’exclusivité du plan d’autonomie comme base pour résoudre le conflit au Sahara occidental, et qu’elle reconnaît explicitement la soi-disant « marocanité du Sahara occidental » et inclut explicitement le présent et l’avenir du Sahara occidental dans le cadre de la prétendue souveraineté marocaine ».
De plus, « cette démarche ne peut en aucun cas contribuer à la relance du processus politique, mais ne fait qu’alimenter l’impasse dans laquelle le plan d’autonomie a plongé la question sahraouie depuis plus de dix-sept ans », comme « elle ne sert pas la paix au Sahara occidental, ni la recherche d’une solution pacifique au Sahara occidental ».
Ahmed Attaf a indiqué : « dans une phase ultérieure, les autorités françaises nous ont informé, par le biais de notre ambassadeur à Paris, du contenu de la lettre que le président français avait l’intention d’adresser au roi du Maroc, en particulier le texte relatif à la question du Sahara occidental ».
« L’ambassadeur à Paris a exprimé aux autorités françaises la position algérienne sur cette démarche, en mettant en garde contre ses graves répercussions et conséquences », a-t-il ajouté.
Ensuite, il y a eu le communiqué du 25 juillet dernier, suivi de la décision prise, hier, de réduire le niveau de représentation diplomatique en France, après la publication par Paris, peu de temps auparavant durant la même journée, de la lettre adressée par Macron au roi du Maroc.
L’Algérie condamne l’assassinat « lâche et abjecte » de Ismaïl Haniyeh
En dernier lieu, le chef de la diplomatie algérienne a condamné « fermement » l’assassinat, ce mercredi, d’Ismaïl Haniyeh, chef du bureau politique du mouvement de résistance islamique Hamas, dans une frappe israélienne à Téhéran (Iran). Haniyeh se trouvait en Iran pour participer à la cérémonie d’investiture du nouveau président iranien.
« Nous condamnons fermement cet attentat terroriste lâche et abject commis par les forces d’occupation sionistes, qui continuent de fouler aux pieds les règles humanitaires, juridiques, politiques et morales les plus élémentaires », a déclaré le ministre des Affaires étrangères.