Le « départ » de Mohammed Charfi de la présidence de l’Autorité nationale indépendante des élections (ANIE) était attendu depuis l’élection présidentielle du 7 septembre dernier.

Le décret présidentiel n° 24-378 du 27 novembre 2024 mettant fin aux fonctions du président de l’Autorité nationale indépendante des élections (ANIE) a été publié au Journal officiel dans la soirée du même jour de sa signature.

Son article premier mentionne qu’ « il est mis fin aux fonctions du Président de l’Autorité nationale indépendante des élections, exercées par M. Mohammed Charfi, sur sa demande pour des raisons de santé ».

Il est sans rappeler que cette élection présidentielle a été marquée par une polémique au sujet des taux relatifs à la participation et le nombre de voix obtenus par chacun des trois candidats.

Tebboune, Hassani Cherif et Aouchiche contestent les résultats

Ces trois derniers, à savoir Abdelmadjid Tebboune, par le biais de son directeur de campagne, Youcef Aouchiche (FFS) et Abdelali Hassani Cherif (MSP), ont même signé une déclaration conjointe, au lendemain de l’élection, le 8 septembre, pour dénoncer « l’opacité et la contradiction dans les chiffres » avancé par Charfi la veille vers minuit.

Le jour de l’élection, à l’occasion des points de presse habituels consacrés à l’annonce de l’évolution du taux de participation, le Président de l’ANIE avait eu recours, à partir du troisième point de presse (pour annoncer la participation à 17h puis à la fermeture des bureaux à 20h) à la fameuse « moyenne des taux de participation », utilisée déjà lors des législatives de 2021.

Une « moyenne » qui était, d’après lui, de 48,03 %, à la fermeture des bureaux, passant du simple à presque le double en l’espace de trois heures.

Le lendemain, Charfi communique les résultats : Abdelmadjid Tebboune, a été réélu avec 94,65% des voix exprimées. Selon lui, le Président sortant a obtenu 5 329 253 voix parmi 5 630 196 voix exprimées.

Abdelaali Hassani Cherif, arrivé deuxième avec 178 797 voix (3,17%), alors que Youcef Aouchiche est troisième avec 122 146 voix (2,16%).

Charfi n’a pas communiqué, lors de sa conférence de presse consacrée pourtant à l’annonce des résultats, le taux de participation, ni le nombre de votants.

Mais un simple calcul fait ressortir que le nombre de voix exprimées, qui est de 5 630 196, représente à peine 23,12% des 24 351 551 d’électeurs inscrits.

C’est à partir de là que les trois candidats ont décidé de « dénoncer » ces chiffres.

La Cour constitutionnelle proclame d’autres chiffres

Une semaine plus tard, le 14 septembre plus précisément, la Cour constitutionnelle proclame les résultats définitifs.

Tous les scores ont été revus à la hausse : le nombre de votants passe à 11 226 065 représentant 46,10% du corps électoral. Le nombre de voix exprimées est de 9 461 428 voix (1 764 637 bulletins nuls).

Le nombre de voix obtenues par Abdemladjid Tebboune est par contre de 7 976 291 voix, soit plus de deux millions de voix que le chiffre avancé par Charfi (5 329 253 voix).

Les résultats des deux autres candidats ont également été revus à la hausse : Abdelaali Hassani Cherif a recueilli ainsi 904 642 voix, soit 9,56%, au lieu de 178 797 voix (3,17%), et Youcef Aouchiche 580.495 voix, soit 6,14%, au lieu de 122 146 voix (2,16%).

Le « départ » de Charfi de la présidence de l’ANIE était donc attendu au vu de l’énorme écart existant entre les chiffres qu’il a avancés et ceux proclamés par la Cour constitutionnelle.

Néanmoins, il ne répond pas aux nombreuses questions posées au sujet de cette « différence ».