Communiqué
Le journaliste Khaled Drareni a été condamné à 3 ans de prison ferme le 10 aout 2020 par le tribunal de Sidi M’hamed . Les avocats de la défense ont fait appel de cette décision. Khaled Drareni était poursuivi dans ce dossier 453 avec deux autres co-inculpés, Samir Belarbi et Slimane Hamitouche, pour les deux mêmes chefs d’accusation : incitation à attroupement non armé et atteinte à l’intégrité nationale. Le rapport de police judiciaire et l’acte d’accusation ne comportaient rien qui permette de soutenir de telles qualifications pour les trois prévenus arrêtés lors de la marche du Hirak du 07 mars 2020.
Le procès a montré l’absence totale d’éléments matériels à charge pour soutenir que les prévenus ont incité à l’attroupement ou porté atteinte à l’intégrité nationale. Le verdict aurait du, en toute conséquence, accéder à la demande de relaxe des avocats. Le tribunal en a décidé autrement. Il a condamné Samir Belarbi et Slimane Hamitouche à des peines fermes inférieures à la période de détention provisoire afin de préserver la décision politique de leur libération du 02 juillet dernier. Il a agi avec Khaled Drareni comme s’il était jugé pour d’autres faits, pour une autre affaire, non évoquée lors de l’audience du 03 aout. Pourtant, sa défense était des plus faciles. La marche débutait à 200 m de son domicile de la rue Didouche Mourad. Il est sorti en assurer la couverture comme il l’a toujours fait depuis le 22 février 2019.
Khaled Drareni a été condamné à trois ans de prison parce qu’il était devenu impossible à l’appareil de la justice algérienne d’assumer en toute indépendance sa relaxe après l’interférence présidentielle à charge dans ce dossier le 02 mai dernier. En affirmant, sans le nommer, lors d’une rencontre de presse, que Khaled Drareni était khardji (un espion) et qu’il s’était rendu directement à une ambassade étrangère après avoir été libéré par les services de sécurité, le président Tebboune a prononcé sa condamnation de fait. La vérité est qu’il n’existe aucune allusion à de tels faits dans le dossier d’inculpation de Khaled Drareni depuis l’enquête préliminaire jusqu’au verdict.
Il s’agit d’une invention malveillante colportée au sommet de l’Etat au but de justifier l’incarcération d’un des plus grands professionnels indépendants, qui a résisté des mois durant aux intimidations des services de sécurité (4 interrogatoires à la caserne Antar) afin qu’il renonce à sa couverture du mouvement populaire. Cette intrusion, sans précédent à ce niveau de l’Etat, dans une procédure judiciaire en cours a empêché le droit de s’exprimer dans un pays ou la décision de justice obéit à l’exécutif et au sécuritaire.
La condamnation de Khaled Drareni a provoqué un choc dans l’opinion algérienne. Elle a soulevé l’indignation de larges pans des citoyens mobilisés dans le Hirak pendant plus d’une année et pour lesquels Khaled Drareni incarne un témoin fidèle de leur sursaut salvateur et l’espoir d’une presse libérée. Elle a relancé une campagne mondiale jamais égalée en solidarité avec un citoyen algérien frappé par une brutale injustice, un journaliste reconnu par ses pairs. Elle a trainé l’Algérie devant les instances internationales en charge des droits humains. C’est une énorme faute politique. Elle ne doit pas se poursuivre un jour de plus. Il est urgent de sortir de l’engrenage du 02 mai 2020. Khaled Drareni doit être réhabilité. Il doit comparaitre libre à son procès d’appel, tout comme ses deux co-inculpés. La cour doit juger les éléments du dossier et rien d’autre. Le salut pour les institutions et l’image de l’Etat passe par là.
Comité de Soutien à Khaled Drareni