Conseil des droits de l’homme de l’ONU : la détention de Farrah et Bendjama jugée « arbitraire »

Le groupe de travail sur la détention arbitraire du Conseil des droits de l’homme de l’ONU a rendu son avis concernant les emprisonnements de Raouf Farrah et Mustapha Bendjama. Il considère leur détention « arbitraire ».
© DR | Le journaliste Mustapha Bendjama et le chercheur Raouf Farrah

Le groupe de travail sur la détention arbitraire du Conseil des droits de l’homme de l’ONU a rendu son avis concernant le journaliste Mustapha Bendjama et le chercheur Raouf Farrah, tous deux arrêtés en février 2023, dans le sillage de l’affaire dite Amira Bouraoui et qui ont passés plusieurs mois de prison (Bendjama a été libéré le 18 avril 2024 après avoir purgé la totalité de sa peine et Farah le 26 octobre 2023 à l’issue de sa peine aussi).

Ainsi, le Groupe de travail a considéré, dans son avis, que la détention de MM. Bendjama et Farrah « arbitraire ».

« La privation de liberté de Mustapha Bendjama et de Raouf Farrah est arbitraire en ce qu’elle est contraire aux articles 3, 9, 11, 19 et 20 de la Déclaration universelle des droits de l’homme et aux articles 9, 14, 15, 19 et 22 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et relève des catégories I, II et III », indique le document, après avoir énuméré les arguments des concernés et ceux des autorités saisies à ce sujet en novembre 2023 et ayant répondu le 1er février 2024.

Le groupe de travail explique que la catégorie I est relative à l’absence de fondement juridique pour justifier la privation de liberté, la catégorie II lorsque la privation de liberté résulte de l’exercice de droits ou de libertés garantis par la Déclaration universelle des droits de l’homme et, en ce qui concerne les États parties au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, et la catégorie III lorsqu’il y a inobservation totale ou partielle des normes internationales relatives au droit à un procès équitable.

A cet effet, le groupe de travail a demandé « au Gouvernement algérien de prendre les mesures qui s’imposent pour remédier sans tarder à la situation de MM. Bendjama et Farrah et la rendre compatible avec les normes internationales applicables, notamment celles énoncées dans la Déclaration universelle des droits de l’homme et dans le Pacte ».

Il a également estimé que « la mesure appropriée consisterait à (…) accorder à MM. Bendjama et Farrah le droit d’obtenir réparation, notamment sous la forme d’une indemnisation, conformément au droit international ».

Par ailleurs, « le Groupe de travail demande instamment au Gouvernement de veiller à ce qu’une enquête approfondie et indépendante soit menée sur les circonstances de la privation arbitraire de liberté de MM. Bendjama et Farrah, et de prendre les mesures qui s’imposent contre les responsables de la violation des droits de ceux-ci ».

Dans le même sens, le Groupe de travail « prie la source (les concernés, NDLR) et le Gouvernement de l’informer de la suite donnée aux recommandations formulées dans le présent avis ».

Le groupe de travail s’est penché sur quatre affaires

Il est à noter que le groupe de travail s’est penché, lors de sa 99e session qui s’est tenu du 18 au 27 mars 2024, et durant laquelle a été évoqué ce cas, sur quatre affaires, à savoir celle relative à la plante déposée par le wali d’Annaba contre Bendjama, durant la crise sanitaire, une deuxième affaire qui remonte à 2019 concernant une publication sur les réseaux sociaux qui lui a valu une condamnation à deux mois ferme, une troisième affaire (condamnation à deux mois avec sursis) toujours relative à une publication sur les réseaux sociaux et la quatrième affaire est celle relative à la sortie du territoire national de Amira Bouraoui.

Arrêtés à la mi-février de l’année dernière, Raouf Farrah et Mustapha Bendjama ont été placés en détention provisoire le 19 février, dans le sillage de l’affaire dite Amira Bouraoui.

Bendjama avait été poursuivi dans deux dossiers distincts.

Ainsi, dans l’un des deux dossiers, Bendjama était poursuivi, avec le chercheur Raouf Farrah, pour les chefs d’accusation de « financement étranger » et « publication d’informations classées secrètes ».

Ils avaient été condamnés, le 29 août 2023, en première instance, à deux ans ferme, avant que ce verdict ne soit ramené, en appel, le 26 octobre de la même année, à vingt mois de prison dont huit mois ferme. Farah, ayant purgé donc sa peine, avait été libéré le jour même (26 octobre 2023), mais Bendjama, poursuivi dans le deuxième dossier, celui relatif à la sortie de Amira Bouraoui du territoire national, est resté en prison.

Ainsi, au mois de novembre 2023, il a été condamné à six mois de prison ferme pour « complicité de migration clandestine ». Ce verdict a été confirmé en appel en janvier 2024.

Le journaliste n’a quitté finalement la prison que le 18 avril 2024 après avoir purgé la totalité des deux peines prononcées à son encontre (huit et six mois).

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