Documentaire : Pierre Clément, un cinéaste pour la cause nationale 

« Pierre Clément, Cinéma et révolution », réalisé par Abdenour Zahzah, a été projeté samedi 14 octobre 2023, à la cinémathèque d’Alger. Un documentaire, basé sur des enregistrements faits par Zahzah avec le concerné en 2004, soit trois ans avant son décès, qui retrace une séquence de la vie du réalisateur qui a épousé la cause algérienne en 1958 lorsqu’il a réalisé son premier film « Sakiet Sidi Youcef », tourné au lendemain des bombardements effectué par l’armée coloniale.  
© DR | CADC (image du documentaire lors de sa projection)

Le hasard a voulu que lors des bombardements de Sakiet Sidi Youcef, un certain 8 février 1958, Pierre Clément, directeur photo, se trouvait en Tunisie pour travailler sur un film de René Vautier. Il se rend sur les lieux dès le lendemain. « Sakiet Sidi Youcef » est donc le premier film de Pierre Clément.

D’une durée de 15 minutes, celui-ci met en évidence les effets des bombardements dévastateurs effectués par l’armée coloniale sur un village tunisien tant sur le plan matériel, avec des habitations complètement détruites, qu’humain, causant des dizaines de morts et de blessés parmi la population.

Les grands plans des visages des enfants blessés, allongés sur des lits d’hôpital, reflétaient de l’incompréhension, par rapport à ce que ces enfants venaient de vivre, mais aussi de la douleur.

 

© DR | L’Affiche du documentaire

 

Au-delà du témoignage sur les monstruosités du colonialisme, le dramatique événement était aussi une occasion pour le cinéaste pour épouser la cause algérienne pour la libération du pays. C’est l’engagement du cinéaste français avec le combat national contre le colonialisme qui est raconté (par lui-même) dans le film documentaire « Pierre Clément, cinéma et révolution », de Abdenour Zahzah.

Pour une multitude de raisons et d’aléas, le film a mis beaucoup de temps pour « sortir ». Pierre Clément a été filmé, chez lui, en France, par Abdenour Zahzah, en 2004. C’est-à-dire il y a dix-neuf ans. Le réalisateur est décédé en 2007.

Le film, même si le projet initial était plus « ambitieux » puisque traitant d’une thématique plus large, comme expliqué par le réalisateur, sort donc cette année (2023).

Ainsi, au-delà de l’individu, en la personne de Pierre Clément, c’est la révolution algérienne, et plus précisément le cinéma durant la révolution, qui est mise en exergue dans ce documentaire.

Le film commence par le visionnage « en entier » du court-métrage « Sakiet Sidi Youcef », par son auteur, qui le commente en donnant des indications sur les circonstances de sa réalisation et ses répercussions, sur le plan personnel, et par rapport à la lutte contre le colonialisme. « C’est une copie originale du film que Pierre Clément nous a remis », a précisé Zahzah. L’autre film de Clément, « Réfugiés algériens », fait avec Djamel Chanderli, d’une quinzaine de minutes aussi, a été également « intégré » au documentaire.

En regardant « Pierre Clément, Cinéma et révolution », c’est « Sakiet Sidi Youcef » et « Réfugiés algériens » qui sont visionnés aussi, à travers lui.

« Il y avait le point de vue français. Il fallait avoir des images racontées par la partie algérienne », dira Clément, qui, à chaque fois, revient sur l’importance des images « vraies » dans la construction de la mémoire collective mais aussi en tant que témoignages de moments précis.

C’est ainsi qu’il s’est retrouvé quelques mois plus tard dans le maquis, avec les combattants du Front de libération national (FLN), avant qu’il ne soit arrêté en octobre 1958 par l’armée française, torturé puis mis en prison.

« J’ai été torturé, avec la gégène, la baignoire, mais je ne pense pas que j’ai subi plus que les algériens », dira Clément à ce sujet.

 

© DR | Abdenour Zahzah, réalisateur du documentaire « Pierre Clément, Cinéma et révolution »

 

Des extraits de « L’Algérie en flammes », de René Vautier et de « Djazairouna », un film collectif de Docteur Chaulet, Djamel Chanderli et Mohammed Lakhdar-Hamina, basé sur des images de « Une nation, l’Algérie » de René Vautier en 1955 et d’autres de Djamel Chanderli prises au maquis, ont également été insérés dans « Pierre Clément, cinéma et révolution ».

Ce documentaire, de plus d’une heure, produit par le Centre algérien de développement du cinéma (CADC), à l’occasion du soixantenaire de l’indépendance, nous plonge finalement dans la vie d’un homme qui a largement contribué à la naissance du cinéma algérien. Un cinéma sur l’Algérie fait à partir d’un point de vue algérien. « Pierre Clément, cinéma et révolution », de Abdenour Zahzah, vaut le coup d’être regardé. Il sera en projection au niveau du réseau des cinémathèques algériennes durant toute la semaine.

 

 

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