Le Premier ministère et le Conseil de la nation ont saisi, chacun de son côté, samedi 16 novembre 2024, la Cour constitutionnelle au sujet de la « constitutionnalité » de certains amendements du projet de loi de finance adoptés par les députés et sénateurs, respectivement mercredi et samedi derniers. »
« Suite à l’adoption, par les deux chambres du Parlement, de la loi portant loi de finances pour 2025, et conformément aux dispositions de la Constitution, notamment son article 193, le Premier ministre, M. Nadir Larbaoui, a saisi, samedi 16 novembre 2024, la Cour constitutionnelle à l’effet d’examiner la constitutionnalité des amendements introduits dans les textes des articles 23, 29, 33 et 55 du projet de loi de finances 2025, au regard de la non-conformité de ces amendements à l’esprit et à la lettre de l’article 147 de la Constitution », indique le communiqué du Premier ministère.
Le Conseil de la nation a également évoqué les mêmes articles dans sa saisine de la Cour constitutionnelle.
Des amendements qui concernent des « baisses » de taxes
Les amendements relatifs aux articles 23, 29, 33 et 55 concernent globalement des « baisses » de certaines taxes décidées par les députés et par la suite adoptées aussi par les membres du Conseil de nation.
L’article 23 vise à obliger les contribuables soumis au régime de l’impôt forfaitaire unique (IFU) à communiquer aux services des impôts, à la fin de l’exercice, le résultat net généré correspondant au chiffre d’affaires déclaré.
L’amendement de l’article 29, lui, a maintenu le minimum annuel de l’IFU à 10 000 dinars, rejetant ainsi la proposition de l’exécutif qui visait à l’augmenter à 30 000 dinars.
L’amendement de l’article 29 a annulé « l’aggravation de la sanction de 500 DA à 100.000 DA en cas d’établissement, par les notaires, d’un acte en vertu ou en conséquence d’un acte dont la mention de l’enregistrement n’est pas précisée ». Les députés ont opté pour une amende de 5 000 dinars.
Quant à l’amendement de l’article 55, il concerne une mesure qui a « pour objet de relever le tarif de la vignette automobile applicable aux véhicules de tourismes et véhicules aménagés en utilitaires, d’une puissance de 10 CV, afin de subvenir à l’entretien des infrastructures routières ».
Un tarif porté, par exemple, de 10 000 dinars pour les véhicules de moins de trois ans à 25 000 dinars.
Les députés n’ont pas annulé ce nouveau tarif mais ont porté la puissance des véhicules concernés de 10 CV à 15 CV.
C’est les amendements de ces quatre articles qui ont été jugé par l’exécutif et le Conseil de la nation potentiellement « non constitutionnels ».
A noter que l’article 147 de la constitution stipule qu’ « est irrecevable toute proposition de loi ou amendement présenté par les membres du Parlement ayant pour objet ou pour effet de diminuer les ressources publiques ou d’augmenter les dépenses publiques, sauf si elle est accompagnée de mesures visant à augmenter les recettes de l’Etat ou à faire des économies, au moins, correspondantes sur d’autres postes des dépenses publiques ».
Le Conseil de la nation adopte le texte et saisi la Cour constitutionnelle
Or, le Conseil de la nation pouvait ne pas adopter les amendements concernés et y aller par la suite vers une commission paritaire.
Durant l’année passée, ce mécanisme a été enclenché à deux reprises, une première fois au mois de juin, au sujet de l’article 22 du code de l’information qui concerne les accréditations des journalistes exerçant en Algérie pour des médias étranger, et une deuxième fois au mois d’octobre à propos de l’article 2 de la loi sur la protection et la préservation des terres relevant du domaine de l’Etat.
L’article 145 de la constitution stipule, dans son alinéa 5, qu’en cas de désaccord entre les deux chambres, le Premier ministre « demande la réunion, dans un délai maximal de quinze (15) jours, d’une commission paritaire constituée de membres des deux chambres pour proposer un texte sur les dispositions objet du désaccord. La commission paritaire achève ses délibérations dans un délai maximal de quinze (15) jours ».
En saisissant la Cour constitutionnelle, après avoir adopté le PLF 2025, le Conseil de la nation a-t-il éventuellement voulu éviter de « rallonger » le temps consacré à l’adoption du texte ? Pour rappel, l’examen du projet de loi au niveau du Conseil de la nation a commencé jeudi 14 novembre. Il a donc été adopté samedi 16 novembre, c’est-à-dire en un temps records de 48 heures.