Présidentielle : un scrutin et beaucoup de leçons à tirer 

L'élection présidentielle du 7 septembre dernier est tout simplement inédite. Mais pas au sens positif. Ce rendez-vous politique d'extrême importance a été finalement un grand ratage. Sur tous les plans, ou presque. D'abord dans sa conception. 
© DR | L'élection présidentielle du 7 septembre 2024

Devant se tenir en décembre prochain, cette joute a été, à la surprise générale, avancée de trois mois pour des raisons que seuls les décideurs, à leur tête le président Tebboune, connaissent.

Aucune explication convaincante n’a été donnée jusqu’à présent, à l’exception d’un commentaire étrange de l’agence officiel APS. Pour de nombreux observateurs et acteurs politiques, ce procédé constitue le début d’un échec programmé.

Depuis, le processus est jalonné de couacs, dont le premier est l’opération de collecte des signatures des électeurs et des élus. Faute d’une préparation technique et administrative, l’opération a fini par dissuader de nombreux acteurs, alors que d’autres sont allés jusqu’à remettre des formulaires vides à l’ANIE. Une première dans l’histoire des présidentielles en Algérie.

Mais c’est déjà un signe avant-coureur de ce qui allait se passer après, à commencer par la campagne électorale, marquée par une désaffection populaire sans précédent. Alors que les candidats et leurs représentants, usant de tous les arguments, appelaient à une forte participation, samedi dernier a été une journée à oublier.

Et pour cause, les électeurs ont carrément boudé les urnes, malgré la décision du président de l’Autorité nationale indépendante des élections (ANIE), Mohamed Charfi, de proroger l’ouverture des bureaux de vote jusqu’à 20h00.

Le grand cafouillage commence avec la trouvaille de Mohamed Charfi qui a annoncé un chiffre fictif de plus 48% de la participation qu’il a appelé « moyenne des taux de participation dans les wilayas ».

Une « moyenne » qui était de 26,46% à 17h00, selon l’ANIE, alors que le taux calculé sur la base de 5 142 134 votants enregistrés jusque-là est de 21,89%.

Le même Mohamed Charfi récidive, dimanche, au lendemain de l’élection, en évitant de communiquer tous les chiffres concernant le scrutin, notamment le taux de participation et le nombre de bulletins nuls. L’homme s’est contenté de donner seulement le nombre de voix exprimées et les scores obtenus par chacun des trois candidats.

Non satisfaits, ces derniers signent un communiqué commun pour dénoncer les chiffres de l’ANIE. Mais ils ont occulté ce nouveau record de l’abstention qui ne s’est jamais produit à l’occasion d’une présidentielle en Algérie. Pourtant, c’est un indicateur politique important à analyser et à comprendre.

Ne faut-il pas chercher à savoir pourquoi les Algériens, qui sont sortis par millions lors du Hirak de 2019 pour réclamer un changement, boudent les urnes depuis la Présidentielle du 12 décembre 2019 ?

Il y a certainement des raisons, notamment le verrouillage des champs politique, syndical, médiatique depuis cinq ans, ainsi que la répression qui a réduit à néant toutes les libertés collectives et individuelles.

Tout est à refaire. Les tenants du pouvoir, de l’avis de nombreux observateurs, n’ont plus le choix, à moins de vouloir aller boire le calice jusqu’à la lie. La réussite d’une joute politique, et c’est vérifié, passe par l’existence d’une vraie vie politique et la défense de toutes les libertés…

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