Revenu devant la chambre d’appel criminelle près la cour d’Alger, après appel du principal accusé, le procès de l’un des auteurs du rapt et de l’assassinat du guide de montagnes français, Hervé Gourdel, le 21 septembre 2014, entre Tizi Ouzou et Bouira, s’est terminé très tard dans la soirée de mardi, avec la confirmation de la peine de mort, retenue contre Abdelmalek Hamzaoui, membre d’un groupuscule de terroristes, Djound El Khilafa, liée à Daesh, qui activait dans certaines régions de la Kabylie, avant qu’il ne soit démantelé et la plupart de éléments neutralisés.
Poursuivis dans plusieurs affaires de terrorisme, Hamzaoui a comparu, sur une chaise roulante, avec six autres accusés, dont cinq accompagnateurs de Gourdel, et un entrepreneur, qui avaient été enlevés par les mêmes terroristes au même endroit et au même moment.
Les six ont été blanchit du délit de non dénonciation de crime et de ce fait, ont été acquittés. Dès l’ouverture de l’audience, suivie en directe par visioconférence, en France, par la famille du défunt, Abdelmalek Hamzaoui refuse d’être jugé en raison de l’absence de son avocate.
La présidente refuse de renvoyer l’affaire et désigne un avocat d’office pour assister l’accusé. Résigné, ce dernier est appelé à la barre. « Vous êtes accusé de rapt, torture, d’assassinat avec préméditation et d’appartenance à une organisation terroriste. Qu’avez-vous à dire ? », lui lance la présidente. L’accusé : « je n’ai pas rejoint les terroristes de manière volontaire. J’ai été enlevé par ces derniers en 2009. Je suis resté captif chez eux durant une année, jusqu’au moment où ils ont commencé à me faire confiance. Je n’activais en raison de mes blessures au bras et à la jambe, causées par un tir d’un des terroristes. Je ne pouvais pas utiliser d’armes ». La juge : « qu’avez-vous à dire sur l’assassinat de Gourdel ? ».
L’accusé : « je n’étais pas avec eux et je ne les ai pas vu. Ce que j’ai dit aux services de sécurité m’a été raconté par des terroristes. Je l’ai déclaré au juge et je lui ai dit que j’étais sous pression et je me suis rendu ». La juge : « vous vous êtes rendu âpres vos blessures ». L’accusé : « non avant. J’étais en contact avec un certain Billel, qui devait m’aider avec les services de sécurité pour me rendre. Lorsque j’ai été blessé, j’ai pris attache avec lui pour qu’il me ramène des médicaments. C’est mon oncle qui m’a mis en lien avec les services de Ben Aknoun ( sièges des services de renseignements militaires Ndlr), qui me demandaient les noms des terroristes et des émirs. La dernière fois, j’été sur le point de me rendre avec une autre personne, mais nous sommes tombés dans un accrochage. J’ai été blessé et transféré au CHU de Tizi Ouzou. Ma famille m’a rendu visite avec les services de sécurité. J’ai informé ces derniers du lieu d’enterrement de Gourdel, dans le « camp Sendouk », des terroristes. Ils sont partis sur les lieux mais ils n’ont rien trouvé. Je les ai accompagnés et nous avons cherché deux ou trois jours avant de trouver la tombe ».
« Je n’ai pas rejoint les terroristes, ils m’ont enlevé »
La juge : « vous étiez en contact avec Ben Aknoun ou avec les éléments qui vous ont accrochés ? ». L’accusé : « avec Ben Aknoun. Ceux qui m’ont blessé ne savaient pas que j’étais en contact avec l’armée. J’avais peur d’être tué ». La juge : « vous aviez fait des déclarations très précises et détaillées durant l’enquête préliminaire et lors des premières auditions chez le juge, puis vous êtes revenu sur vos propos. Vous vous êtes contredit ». L’accusé : « ils m’ont demandé de faire ces déclarations. Je suis resté chez eux durant 5 mois. Oui j’ai dit que nous avions enlevé et séquestré Hervé Gourdel ». La juge : « qui vous a parlé du rapt, de l’assassinat et de l’enterrement de Gourdel ? ». L’accusé : « j’ai entendu des membres de l’organisation dont je faisais partie ». La juge : « comment s’appelle-t-elle ? ». L’accusé : « je ne sais pas. Je suis handicapé. Je ne bougeais pas ». La présidente : « qui était votre émir ». L’accusé : « je ne sais pas. C’est Al Bara’a Lemsili qui m’a raconté les détails ». La juge : « qui était votre émir ? ». L’accusé : « je ne sais pas ». La juge : « vous êtes restés six ans dans les rangs de cette organisation et vos ne connaissez pas votre émir ? ». L’accusé : « nous ne restions pas avec les émirs ». La juge l’interroge sur la distance qui sépare le lieu du rapt de Gourdel et de celui où il a été blessé et Hamzaoui répond : « à peu près 5 ou 6 jours de marche. Le lieu dépend de Iferhounene (Daira et commune dans la wilaya de Tizi Ouzou, mais la dépouille a été déterrée dans la commune de Abi Youcef, commune voisine à Iferhounene Ndlr). Moi j’étais à Boumerdes et ils m’ont transféré à Jijel pour me soigner ». La juge : « vous n’avez participé ni au rapt ni à l’assassinat ? ».
« Le responsable me donnait le téléphone pour communiquer avec Bilel »
L’accusé acquiesce, et c’est le procureur général qui entame son interrogatoire. « Qui vous a amené vers le groupe terroriste ? », lui demande-t-il et Hamzaoui répond : « j’ai été pris lors d’un faux barrage. Ils voulaient prendre la voiture parce qu’ils avaient un malade. Ils m’ont pris avec eux ». Hamzaoui nie connaitre l’émir Gouri, mais le magistrat lui rappelle qu’il est de Boumerdes, sa région. Le magistrat : « Ou aviez-vous été blessé par balles au bras et au pied ? ». L’accusé : « les Ouacifs, dans la forêt Laaziz, Daira de Azazga, à Tizi Ouzou. Celui qui m’a blessé est Abou Merouane de Lakhdaria ». Le magistrat l’interroge sur Billel Debari, de Boumerdes, et ses premiers contacts avec lui. « C’était en 2009. Je l’ai contacté par téléphone ». Le magistrat : « vous aviez un téléphone ? ». L’accusé : « il appartient au responsable ». Le magistrat : « comment votre responsable peut-il vous donner un téléphone pour appeler les services de sécurité ? ». L’accusé : « je lui ai dit que c’était pour qu’il nous aide à nous procurer des médicaments ». Le magistrat : « vous aviez des idées djihadiste et vous aviez refusé de vous rendre… ». L’accusé : « le premier qui est venu me voir était mon père puis Billel qui m’a trahi. Je lui ai demandé de venir sinon je sors crier dans la rue pour avoir de l’aide. Il n’est pas venu seul ».
Interrogé sur les terroristes qu’il connait, Hamzaoui cite Abou Younes, Oussama, Oubaida. Le magistrat lui rappelle : « et Al Bara ? ». L’accusé : « celui-là je l’ai connu à Boumerdes ». La juge reprend le micro : « vous aviez déclaré avoir été enlevé et que vous n’aviez pas la confiance des terroristes, comment peuvent –ils alors vous donner un téléphone pour parler à Billel de votre projet de reddition et contacter les services de Ben Aknoun pour les informer. Est-ce normal ? ».
L’accusé : « j’ai dit au responsable que c’était pour ramener des médicaments. Je lui ai parlé d’un ami de confiance à Tizi Ouzou et il m’a cru ». Le procureur général : « étiez vous dans les rangs de Djound El Khilafa ou Daesh ». L’accusé se contente de dire qu’il ne connait aucune de ces organisations et qu’il a entendu leurs noms chez les services de sécurité.
Le magistrat : « vos déclarations concordent exactement avec celles des autres accusés. Vous aviez parlé du 2ème groupe dirigé par l’émir Gouri, venu accompagné de trois terroristes et affirmé que ce sont ces derniers qui ont enlevé Gourdel, sur ordre de Gouri et que c’est celui-ci avec Lemsili, qui l’ont égorgé et enterré ».
L’imperturbable accusé nie et se contredit
Imperturbable, l’accusé continue à nier les faits. Le magistrat : « où avez-vous activé durant les six années de maquis ». L’accusé : « j’étais à Boumerdes et après ma blessure, j’ai été transféré à Tizi Ouzou, puis à Bordj Bou Arreredj ». Le magistrat : « quelle preuve avez –vous sur votre enlèvement ? Vos parents ont-ils déposé plainte pour rapt ? ».
L’accusé : « je ne sais pas. La voiture que j’avais est toujours chez les services de sécurité. Il n’y a aucune preuve sur un quelconque mensonge de ma part. On m’appelle Abderrahmane Abou Hafs, parce que n’importe quel terroriste qui arrive chez eux, il doit changer de nom ».
La présidente fait remarquer : « rappelez-vous, vous venez de dire n’importe quel terroriste ». Le procureur général reprend son interrogatoire : « puisque vous êtes handicapé et que de ce fait vous ne pouvez pas être actif, pourquoi vous ont-ils gardé dans cette organisation ? ». L’accusé : « pour éviter la fitna. En plus, ils avaient peur que je délivre aux services de sécurité leurs secrets et qu’ils soient obligés de changer tous leurs plans ».
Hamzaoui persiste à nier avoir déclaré qu’il faisait partie du 2ème groupe, de quatre terroristes, dont l’émir Gouri, qui a enlevé Gourdel. « Ce sont les services de sécurité qui m’ont fait réciter ce scénario. Si c’était mes aveux je ne les aurais pas oubliés. Comment pourrais-je me rappeler du nom de Gouri et pas des autres ? ».
La défense de l’accusé : « pourquoi avez –vous été enlevé ? ». Hamzaoui : « ils avaient besoin d’une voiture parce qu’ils avaient un blessé. J’étais au volant et j’ai fait exprès de renverser le véhicule dans un ravin. Ils m’ont rattrapé et pris avec eux pour ne pas les dénoncer. Je suis resté 4 mois dans le camp et ils m’ont chargé de la surveillance des lieux. Après ma blessure, ils ne m’ont donné aucune mission ». La juge : « comment pouvez-vous surveillez alors que vous avez été enlevé ? Je veux être convaincue ». « Je restais juste sur les arbres et en cas où je vois un convoi de l’armée sur les montagnes, je les informe », répond Hamzaoui avant de reprendre sa place.
La présidente appelle les quatre accompagnateurs de Gourdel, (en liberté) poursuivis pour « non dénonciation de crime et non déclaration d’hébergement d’un étranger ».
Des accompagnateurs victimes qui basculent vers le statut d’accusés
Le premier à être auditionné est Karim Oukara, qui affirme avoir connu le défunt Gourdel, sur les réseaux sociaux du fait qu’il partageait avec lui la passion de l’escalade. « Gourdel voulait visiter le Djurdjura. Je l’ai invité. Comme j’habite en France, j’ai profité des vacances pour venir au pays, au mois d’aout et Gourdel est arrivé le 20 septembre 2015. Je l’avais reçu à l’aéroport avec Oussama Dahendi. Nous nous sommes entendus sur un programme de 5 jours. Une journée pour le Djurdjura, une journée au Cap Carbon, à Bejaia, et une journée à la Casbah d’Alger. Nous sommes allés dans un chalet loué à Bouira, où je lui ai présenté le reste du groupe. Le lendemain nous sommes sortis très tôt, pour l’escalade, mais le temps n’était pas propice. Il était mauvais. Nous avons donc décidé de faire une promenade dans le mont Lala Khedidja. Nous avions beaucoup marché. Vers 14 heures, nous avions fait une pause. Nous n’avions plus d’eau et nous commencions à chercher des sources. Nous avons rencontré un berger qui nous a orientés vers un bassin situé à plus de 20 minutes de marche dans la forêt, où nous avions bu et rempli nos gourdes. Après une heure de randonnée, et sur notre chemin de retour, trois terroristes armés, qu’on pensait être des militaires déguisés, ont surgit de nulle part. Ils nous ont mis à terre et commencé à nus poser plein de questions sur les raisons de notre présence sur les lieux. Ils nous parlaient de Daesh, du djihad. L’un d’eux était derrière moi. Je l’ai entendu dire à Gourdel pourquoi il ne parlait pas. Gourdel a expliqué qu’il ne comprenait pas l’arabe. Oussama m’a dit qu’il avait vu deux autres terroristes qui nous surveillaient de loin. Une demi-heure après, ils nous ont dit de partir. Après quelques minutes de marches, un autre groupe est arrivé en courant. Les terroristes nous ont mis à terre et nous parlaient de manière agressive. Ils nous ont demandé ce que faisait Gourdel avec nous. Ils nous ont séparé et chacun de nous était interrogé par un des terroristes ».
« Hamzaoui était très proche de l’émir, il portait une tenue afghane et une kalachnikov »
La juge : « Malek Hamzaoui était parmi le 1er ou le 2ème groupe ? ». Oukara : « il était avec le 2ème groupe et il était armé. Vers le coucher du soleil, un 3ème groupe composé de 40 ou 60 terroristes est venu. Ils nous ont sommés de nous ont mis en file indienne puis nous ont sommés de nous assoir par terre. À ce moment, l’émir est arrivé avec un autre terroriste. Nous l’avions entendu dire « nedou al gaouri » (nous prenons l’étranger). Je me suis opposé et l’un d’eux m’a dit en exhibant son arme : nous le prendrons que tu le veuille ou non ».
« Il m’a pris les clés de ma voiture et ils ont pris Gourdel. Un groupe est parti avec l’émir et un autre est resté avec nous. Vers une heure du matin, un groupe de terroristes est revenu. Il a ramené Amara Ferdjellah, et rendu les clés de ma voiture. IIs nous ont demandé de monter dans la voiture et de rester jusqu’à ce qu’au matin. Nous sommes restés les quatre sans bouger dans la voiture et Ferdjellah dehors. Vers 4 heures du matin, Karim a dit il n’y a personne dehors. Nous avons démarré et nous nous sommes dirigé vers le 1er barrage militaire de Tikejda pour alerter les services de sécurité ».
Le procureur général lui demande pourquoi aucun parmi les quatre accompagnateurs n’a utilisé le téléphone. « Nous étions tétanisés par la peur. Ils étaient une soixantaine, armés de kalachnikovs. Comment pouvons-nus utiliser les téléphones ? », répond Oukara. La présidente : « est-ce que Hamzaoui était parmi eux ? ». Oukara : « bien sûr qu’il y était. Il avait une kalachnikov, le bras entouré par un bandana noire et il courrait ».
La juge appelle Hamzaoui : « qu’avez-vous à répondre ? ». L’accusé : « je n’étais pas présent. J’étais blessé au pied et au bras. Cette personne a été ramené la journée et visage découvert et a dit ne pas se souvenir de moi. Pourquoi je vais couvrir main ? Personne parmi les accompagnateurs n’a dit que j’avais le bras couvert ».
Oukara : « lorsque les services m’ont montré sa photo je l’ai reconnu tout de suite. Je peux ne pas reconnaitre les 60 autres, mais lui je ne pouvais pas l’oublier. Il était le premier qu’on a vu. Il parlait en kabyle avec l’un d’entre nous et allait discuter avec Gouri l’émir ». Hamzaoui : « pourquoi les autres ne m’ont pas reconnu ? ».
Clairement identifié par ses victimes, l’accusé persiste à nier
Le procureur général : « pourquoi n’avoir pas informé de l’hébergement de Gourdel aux services de sécurité ». Oukara : « nous avons fait une attestation d’hébergement déposée au niveau de la mairie d’El Asnam, à Bouira, où on devait camper, afin de lui faciliter les procédures de visa. A cette époque, il n’y avait pas de terroristes dans la région. Nous ne savions pas qu’il fallait informer les services de sécurité.
Les déclarations de Boukamoum Hamza, Oussama Dahendi, Kamel Saadi et Amine Ayache (en liberté), poursuis pour les mêmes griefs que Oukara, rejoignent toutes celles de leur prédécesseur à la barre. Aucune contradiction ou détail manquant dans la déposition.
Tout comme Oukara, Hamza Boukamoum, est formel : « Hamzaoui était avec l’émir Gouri. Il me parlait en kabyle et après il allait discuter avec l’émir. Lorsqu’il est venu avec le 2ème groupe il m’a donné la main gauche et me parlait en kabyle. Dès que j’ai vu sa photo, je l’ai reconnu. J’ai remarqué qu’il était proche de Gouri. Il faisait des va-et-vient entre lui et les autres. Je l’ai revu sur la vidéo. Je pense qu’il était le quatrième à droite et portait la kalachnikov avec la main gauche vu que son bras droit était blessé ».
Hamzaoui, très serein répond : « je l’ai vu chez le juge. Il a dit que j’avais le bras entouré par un chèche. Or quelqu’un d’autre le portait sur la gauche et personne n’en a parlé aux gendarmes ».
Oussama Dahendi confirme lui aussi la version de ses co-accusés, en précisant : « même si je ferme les yeux, je peux vous dire ce que Hamzaoui portait ce jour-là, comment il était, et à qui il a parlé. Tout ce qu’il a dit est mensonge. Je ne peux pas l’oublier. Il apparaissait comme le bras droit de Gouri. Lorsque j’ai parlé à Gouri, il était à son coté. C’est comme son guide. Il portait sur son bras droit, un bandana noir avec un cordon blanc. Je ne peux effacer de ces détails de ma mémoire même si lui, dit le contraire. Il parlait kabyle et on l’appelait le kabyle ».
Hamzaoui réplique : « je l’ai vu pour la première fois chez le juge. Il n’a rien dit à l’instruction. Je ne suis pas le seul kabyle. Il n’a jamais dit avant que j’étais un élément actif. Si je l’été, il m’aurait vu partout pas uniquement avec le 2ème groupe ».
« Je peux fermer les yeux et vous dire ce que portait Hamzaoui et comment il était »
Lui succédant à la barre Kamel Saadi, ajoute au témoignage de Dahendi cette déclaration : « Hamzaoui avait une petite barbe et portait une tenue afghane. Il avait le bras droit soutenu par un atèle et couvert par un bandana noir. Je l’ai touché en lui donnant la main. En prenant Gourdel, ils m’ont dit on va faire entendre son affaire dans le monde entier. Lorsqu’ils avaient isolé Gourdel, ils nous ont ramené à manger et ils nous ont dit que ce sont les émirs qui décideront, peut-être une rançon, ou un échange d’otages. C’est un apostat ».
Hamzaoui : « lorsque les terroristes circulent la journée, ils ne mettent pas la tenue afghane et ne portent pas de barbe. Pourquoi personne n’a parlé de ce bandana noir avant ? ». Amine Ayach avait 18 ans lors des faits, et préparait son bac. Il raconte la terreur qu’il a vécue.
« Ils me posaient des questions bizarres sur la prière, le coran, sur ma manière de m’habiller et de me coiffer, sur le djihad … etc. Lorsqu’ils sont venus prendre Gourdel, nous avons tenté de les dissuader mais ils nous ont dit qu’ils allaient régler des choses avec lui et revenir. Je ne connaissais pas Gourdel. Je voulais juste sortir avec le groupe. J’étais champion d’Algérie de l’escalade et Gourdel voulait nous aider à ouvrir de nouvelles voies. J’ai été traumatisé. J’ai reprise l’escalade en 2019 et j’ai gagné le championnat ».
La partie civile : « L’accusé s’est montré en tant que terroriste. Il est resté terroriste »
Fardjellah Amara, poursuivi pour non dénonciation de crime. Par un concours de circonstance, il s’est retrouvé dans un faux barrage. « Vers 21 heures, je roulais avec ma voiture et subitement un homme en tenue militaire et portant une kalachnikov s’est dressé sur ma route et m’a arrêté. En fraction de secondes, plusieurs autres m’ont encerclé. L’homme m’a tiré de la voiture et m’a mis par terre. Puis leur chef, m’a rassuré en me disant qu’il voulait la voiture. Ils avaient un blessé avec eux. Je les ai vu enlever les tenus militaires et Gouri grande taille et bien rasé milieu. On m’a mis un bandage sur les yeux et on m’a fait marcher. J’ai entendu des bruits de pas et de chaines et une fois arrivé, on m’a enlevé le bandage des yeux. J’ai vu que ces gens se chamaillent entre eux. Je leur ai demandé s’ils avaient des kalachnikovs et de lance-roquettes. Je me suis isolé du groupe. Je voulais récupérer ma voiture. Ils me l’ont ramenée mais sans essence. J’ai mis plus de 4 heures pour arriver au premier poste militaire ».
Les auditions se terminent et la présidente demande aux greffiers de faire défiler les photos des terroristes, Gouri Abdelmalek, Amine Abdesadok Belhout, Moumene Abderrahmane, dit Abou Al Moutawakil Al Mordad, Hamzaoui Mohamed, dit Abou Youcef, Mohamed Serraj, dit Abou Oumama Yaakoub, Omar Billel, dit Abou Houraira Thabet, sur l’écran.
La majorité sont reconnue par les accusés. La présidente donne le signal pour diffuser la vidéo de l’exécution de Gourdel et la revendication de l’assassinat. Les images sont aussi violentes que terrifiantes. Elles font fondre en larme, un des avocats de la partie civile.
Le frère de Gourdel, intervient de France par visioconférence. « Nous retenons en tant que partie civile, que l’accusé n’a à aucun moment exprimé un sentiment de repentance ou de regret (…) Nous étions prêts à entendre une parole de regret mais en vain. Nous voulons une peine exemplaire. Il s’est montré en tant que terroriste. Il faut donc protéger la société civile algérienne de cet homme. Il se comporte toujours en tant que terroriste ».
« Les déclarations de Hamzaoui, constituent une insulte à l’intelligence humaine »
Agissant au nom de la compagne de Gourdel et de son fils, Maitre Rachid Ouali, est revenu sur le danger et la menace terroriste en Algérie et à travers de nombreux pays, avant de revenir sur les faits en se demandant ce qu’a pu faire Gourdel à ses bourreaux pour lui faire subir toute cette horreur.
Pour lui, « les déclarations de Hamzaoui, constituent une insulte à l’intelligence humaine. Hamzaoui était heureux d’offrir la vire de Gourdel à qui ? A El Khalifa El Baghdadi, en signe d’allégeance à son organisation terroriste. L’Algérie est un pays de paix et non pas de terreur. Gourdel a laissé comme héritage un enfant devenu, depuis la mort de son père, policier qui sauve des vies humaines dans les montagnes. Qu’avez-vous laissé, vous Hamzaoui, à l’Algérie ? ».
Dans un long réquisitoire, le procureur général est revenu sur les faits puis précisé dans quelle circonstance Hamzaoui a été arrêté, le 14 janvier 2015, après un accrochage qui a couté la vie à son acolyte. « Il a tout reconnu et les cinq accusés l’ont reconnu et identifié parmi les auteurs du rapt. Sans lui, jamais la tombe de Gourdel n’aurait été retrouvée. Ils l’ont tué de manière sauvage et l’ont enterré sans respect du au mort. Ils l’ont mis à quelques centimètres sous terre, pour être dévorés par les loups et les chacals et les hyènes ».
Il requière la peine capitale contre Hamzaoui, une peine de 2 ans contre les cinq accompagnateurs de Gourdel et une année de prison contre Amara Fardjellah.
Très tard dans la soirée, la chambre criminelle a prononcé la peine capitale contre Malek Hamzaoui, après l’avoir reconnu coupable du rapt et l’assassinat d’Hervé Gourdel et l’acquittement pour ses cinq accompagnateurs et l’entrepreneur.