Tout à tour, le ministre français de l’Intérieur, puis le chef de la diplomatie, se sont exprimés sur l’Algérie en menaçant d’une « riposte ». Les membres du gouvernement français ont réagi au « refus », comme ils l’ont affirmé, de l’Algérie de laisser débarquer l’influenceur établi en France, « Doualemn », arrêté et expulsé vers l’Algérie.
« L’Algérie cherche à humilier la France », a estimé vendredi 10 janvier le ministre de l’intérieur, Bruno Retailleau. « Je pense qu’on a atteint avec l’Algérie un seuil extrêmement inquiétant », a-t-il ajouté.
« La France n’aura pas d’autre possibilité que de riposter » si « les Algériens continuent cette posture d’escalade », a indiqué, de son côté, près d’une heure plus tard, le même jour, le ministre français des affaires étrangères, Jean-Noël Barrot. Parmi « les leviers » qui pourraient être « activé », a-t-il indiqué, « les visas », « l’aide au développement » et « un certain nombre d’autres sujets de coopération ».
Affaire Sansal, refus d’accueillir un citoyen extradé…
Les relations entre l’Algérie et la France semble, à cet effet, se dégrader jour après jour. Ce deuxième épisode, après celui relatif aux déclarations du Président français, Emmanuel Macron, tenues lundi 6 janvier dernier, au sujet de l’affaire dite Boualem Sansal, et qui ont été dénoncées par l’Algérie, va indéniablement compliquer davantage les choses.
Si les poursuites engagées contre des « influenceurs » au sujet d’appels au meurtre ou discours de haine peuvent être compréhensibles, beaucoup d’algériens ont d’ailleurs salué ces procédures, le traitement politico-médiatique qui s’en est suivi soulève des questionnements quant aux objectifs de la démarche.
Après le « refus » de l’Algérie de laisser débarquer l’influenceur en question, et au-delà de la réaction des membres du gouvernement français, des voix se sont élevées pour remettre sur la table, encore une fois, l’accord de 1968.
C’est le cas de l’ancien Premier ministre, Gabriel Attal, qui a estimé, dans une tribune publiée vendredi 10 janvier, en début de soirée, sur les colonnes du journal « Le Figaro », qu’ « il faut dénoncer l’accord franco-algérien de 1968 ». Outre l’affaire du renvoi de l’influenceur, celui-ci a évoqué aussi l’arrestation de Boualem Sansal.
Bien entendu, celui qui a été le premier à réclamer la remise en cause de cet accord, l’ancien ambassadeur de France à Alger, Xavier Driencourt, partisan d’une « ligne dure » envers Alger, s’est exprimé sur la question sur plusieurs médias.
Toujours sur « Le Figaro », il propose « l’interdiction des vols d’Air Algérie » ou encore la « restriction de circulation » du personnel diplomatique algérien en France ou même de celui de la Grande mosquée de Paris.
Tous cela pour dire que la tension monte en France, au sujet de l’Algérie, ceci alors que les autorités algériennes n’ont pas réagi jusque-là à ce dernier épisode.
Macron « s’immisce » dans l’affaire Boualem Sansal
Il est utile de rappeler, à cet effet, que les relations entre les deux pays se sont dégradées déjà durant l’été dernier.
Le 30 juillet 2024, le Gouvernement algérien avait décidé du retrait de son ambassadeur auprès de la République française « avec effet immédiat », et ce, suite à la reconnaissance par la France du « plan d’autonomie marocain comme la seule base de règlement du conflit du Sahara Occidental dans le cadre de la prétendue souveraineté du Maroc », comme indiqué par le ministère des Affaires étrangères.
Depuis, la représentation diplomatique algérienne en France est dirigée par un chargé d’affaires.
L’arrestation de l’écrivain Boualem Sansal, à la mi-novembre à l’aéroport d’Alger, pour, selon toute vraisemblance, les propos qu’il avait tenu le 2 octobre sur le média français d’extrême droite, « Frontières », remettant en cause l’intégrité territoriale algérienne, en amputant le territoire d’une partie de son Ouest au bénéfice du Maroc, a été l’élément déclencheur de ce dernier épisode.
Certains politiques français, à l’image de Xavier Driencourt, ont évoqué une « prise d’otage ». Plusieurs membres du gouvernement français, comme le ministre de l’Intérieur ou le porte-parole du ministère des Affaires étrangères, se sont exprimées sur cette affaire.
Mais le 6 janvier dernier, c’est Président français, Emmanuel Macron, qui évoque l’arrestation de l’écrivain, en estimant que l’Algérie se « déshonore » en ne le libérant pas.
Des propos qui ont fait réagir le gouvernement algérien qui a affirmé, dès le lendemain, que les propos du Président français concernant l’Algérie « déshonorent, avant tout, celui qui a cru devoir les tenir de manière aussi désinvolte et légère ».
Alger a considéré que cela est « une immixtion éhontée et inacceptable dans une affaire interne algérienne ».
L’historien Benjamin Stora a estimé, vendredi, sur RTL, que » le seuil « critique » actuel « n’a jamais été atteint auparavant ».