La suppression de la TAP (taxe sur l’activité professionnelle), décidée par le Président de la République, a poussé le législateur à proposer, dans le projet de la loi de finance pour l’année 2024, dont nous détenons une copie, d’autres revenus fiscaux pour les collectivités locales, en créant de nouvelles taxes ou en réaménageant les parties bénéficiaires pour d’autres.
Comme précisé dans ce projet, « le produit de la TAP constitue la principale source de financement des budgets des collectivités locales, avec un rendement qui dépasse 75% de la totalité́ des recettes fiscales communales ».
Déjà, « les dispositions de la loi de finances pour l’année 2022, ont énoncé́ la suppression totale de la TAP sur les activités de production et la réduction du taux de cette taxe de 25%, pour les autres activités (à l’exception de l’activité́ de transport par canalisation des hydrocarbures) ».
Résultat : « ces dispositions ont marqué une régression importante des ressources revenant aux collectivités locales, avec une moins-value fiscale de la TAP estimée, au titre de l’exercice 2022, à 60 Milliards de DA ». « Sa suppression totale, programmée à court-terme, induira un manque à gagner qui s’élèvera à 200 Milliards de DA », ajoute la même source.
Taxe locale de solidarité, torchage, vignette et chargements prépayés
Pour remédier à ce manque à gagner, le législateur a proposé, entre autres, dans ce projet de loi de finance pour l’année 2024 d’instituer une « taxe locale de solidarité » (article 15). Une taxe « due à raison du chiffre d‘affaires réalisé́ en Algérie par les contribuables qui exercent l’activité́ de transport par canalisation des hydrocarbures, les activités minières dont les profits relèvent de l’impôt sur revenu global ou de l’impôt sur les bénéfices des sociétés ». Le produit de cette taxe est « exclusivement affecté aux budgets des collectivités locales », sachant qu’elle est de l’ordre de 3% pour l’activité́ de transport par canalisation des hydrocarbures et de 1,5% pour les activités minières. Le produit de cette taxe est reparti comme suit : « 50%, au profit de la commune, 29 %, au profit de la wilaya et 21 %, au profit de la caisse de solidarité́ et de garantie des collectivités locales (CSGCL) ». Les prévisions de réalisations de cette taxe pour l’année 2024 sont de l’ordre de 6 763 658 599 DA (6,763 milliards de dinars).
Par ailleurs, il a été proposé d’« augmenter la quote-part revenant à la CSGCL de 30 à 50%, du produit de la vignette sur les véhicules automobiles ». Jusqu’en 2015, le produit de la vignette était affecté à raison de 80% au profit de la CSGCL (20% au budget de l’Etat), avant d’être révisé́ à la baisse en 2016 à 30% (50% au budget de l’Etat et 20% au Fonds national routier et autoroutier). Dans ce projet donc, il est ramené à 50%. Une révision de la répartition qui « engendrerait, au titre de l’exercice 2024, des recettes supplémentaires estimées à 2,84 milliards de dinars, au profit de la CSGCL.
Il est question aussi de l’« augmentation à 50% de la quote-part prévisionnelle revenant à la caisse de solidarité́ et de garantie des collectivités locales, au titre du produit de la taxe applicable aux chargements prépayés (des opérateurs de la téléphonie mobile, NDLR) ». Ainsi, le produit de la taxe sur le montant de rechargement, est réparti équitablement entre le budget de l’État et cette caisse à hauteur de 50% pour chacune des deux parties. « En 2021, le produit de la taxe de chargements prépayés était de 15,61 milliards de DA », rappelle-t-on dans ce projet. La CSGCL ne recevait qu’« un pour cent (1%) du produit de cette taxe, soit 156,1 millions de DA ». Cette proposition permettra donc d’augmenter les capacités financières de la CSGCL pour les porter à 9,33 milliards de DA.
La taxe sur les produits pétroliers : des recettes de 186 milliards de DA pour les collectivités locales
Il y a également l’affectation d’une quote-part de 50% du produit de la taxe de torchage au profit de la CSGCL (les 50% restant au profit du budget de l’Etat). Une nouvelle répartition qui « engrangerait, au titre de l’exercice 2024, des recettes supplémentaires estimées à 12,01 milliards de dinars, au profit de la caisse de solidarité́ et de garantie des collectivités locales ».
Mais la plus importante ressource fiscale pour les collectivités locales sera sans doute celle liée à la taxe sur les produits pétroliers (TPP). Affectée auparavant complètement au budget de l’Etat, désormais, dans le cas où ce projet de loi de finance est adopté en l’état, 50%, reviendrait à la commune, 29%, au profit de la wilaya et 21 %, au profit de la caisse de solidarité́ et de garantie des collectivités locales. Une nouvelle répartition qui « assurera des recettes au profit des collectivités locales de l’ordre de 186 milliards de dinars », réparti entre les communes 93 milliards de DA, les wilaya 54 milliards et la CSGCL39 milliards de DA.
En somme, c’est le produit de cette taxe sur les produits pétroliers qui couvrira, presque entièrement, le manque à gagner estimé à 200 milliards de dinars dû à la suppression de la TAP.