Le président libanais Michel Aoun a chargé lundi Najib Mikati, ancien Premier ministre, de former un nouveau gouvernement. Ses deux prédécesseurs avaient échoué à mettre en place un cabinet censé lancer les réformes nécessaires pour sortir le Liban d’une crise inédite.
Alors que le Liban est confronté à la pire crise socio-économique de son histoire, Najib Mikati, ancien Premier ministre, a été désigné lundi 26 juillet par le président libanais, Michel Aoun, pour former un nouveau gouvernement.
Lors de consultations parlementaires contraignantes menées par le président, Najib Mikati a reçu l’appui de 72 parlementaires, tandis que 42 députés se sont abstenus de le nommer.
Dix jours auparavant, l’ex-Premier ministre Saad Hariri avait annoncé jeter l’éponge, à peine neuf mois après sa nomination. Avant lui, Moustapha Adib, nommé après l’explosion au port de Beyrouth, en août 2020, avait également échoué à former un gouvernement en raison des marchandages.
Saad Hariri et son groupe parlementaire ont approuvé la désignation de Najib Mikati qui a aussi reçu l’aval du mouvement chiite armé Hezbollah, un allié de Michel Aoun et une force politique incontournable dans le pays.
Un délai d’un mois
C’est le gouvernement de Hassan Diab qui gère les affaires courantes depuis sa démission en août 2020, après la gigantesque explosion au port qui a fait plus de 200 morts et dévasté des quartiers de la capitale.
Depuis, l’impasse s’est éternisée, sur fond de marchandages politiciens, empêchant la formation d’un gouvernement réclamé par la communauté internationale pour mener des réformes destinées à débloquer les aides pour le Liban.
Najib Mikati a déjà présidé deux cabinets en 2005 et 2011. Il devrait proposer une liste de ministres qui soit acceptée par les grands ténors d’une classe dirigeante, inchangée depuis des décennies et accusée de corruption et d’incompétence par une grande partie de la population.
Celui-ci a promis, avant sa désignation, de former un nouveau gouvernement dans un délai d’un mois, selon les médias locaux. La formation d’un gouvernement risque toutefois de prendre encore des mois, alors que le pays est en proie à une crise classée parmi les pires dans le monde depuis 1850 par la Banque mondiale.
« Rien ne garantit que les éléments nécessaires à la formation d’un gouvernement soient réunis« , a souligné le quotidien Al-Akhbar, citant des défis relatifs à la distribution des postes et des portefeuilles.
« J’ai besoin de la confiance du peuple »
Après sa rencontre avec Michel Aoun, Najib Mikati a assuré devant les journalistes avoir conscience de la tâche « difficile » qui lui incombe.
« Mais si je n’avais pas eu les garanties externes nécessaires (…), je n’aurais pas assumé » cette responsabilité, a-t-il déclaré, en allusion aux puissances étrangères impliquées dans le dossier libanais.
En revanche, « j’ai besoin de la confiance du peuple (…) Seul, je ne pourrai pas faire de miracles« , a-t-il poursuivi, appelant à la collaboration de tous les partis politiques, loin des tiraillements et marchandages habituels qui caractérisent la formation des gouvernements au Liban.
Symbole de népotisme et de corruption
Najib Mikati possède une fortune estimée à 2,7 milliards de dollars selon le magazine Forbes. Il est perçu dans son pays comme l’un des symboles d’un pouvoir accusé de népotisme et ayant survécu à un soulèvement populaire inédit fin 2019.
Soupçonné en 2019 d’enrichissement illicite, Najib Mikati a une faible cote de popularité, y compris dans sa ville natale de Tripoli (nord). Dimanche soir, des dizaines de personnes ont manifesté devant sa résidence de Beyrouth, l’accusant de corruption et de népotisme.
Mais les chefs de partis le perçoivent comme un candidat consensuel capable de dénouer le blocage ayant entravé, jusqu’à présent, la formation d’un gouvernement crédible, préalable au déblocage d’une aide internationale cruciale.
La communauté internationale, menée par la France – ancienne puissance mandataire, s’était en effet engagée en faveur d’une aide de plusieurs milliards de dollars.
Malgré les menaces de sanctions par l’Union européenne contre les dirigeants libanais, aucun progrès n’a été réalisé.
Najib Mikati a promis un cabinet conforme aux « attentes du peuple » avec pour principale tâche de « mettre en oeuvre l’initiative française » du président Emmanuel Macron, comme ses deux prédécesseurs.
L’effondrement économique au Liban a provoqué une paupérisation à grande échelle, une hyperinflation, et des pénuries en tout genre
La livre libanaise a perdu plus de 90 % de sa valeur face au billet vert depuis fin 2019, dépassant récemment le pic historique de 22 000 livres pour un dollar, contre 16 500 lundi et un taux officiel toujours maintenu à 1 507 livres pour un dollar.
La France a annoncé une nouvelle conférence d’aide internationale au Liban le 4 août, pour « répondre aux besoins des Libanais« .
Elle coïncidera avec le premier anniversaire de l’explosion dévastatrice au port de Beyrouth, imputée à la négligence des autorités.